Le seul titre nobiliaire de la Jacetania est le marquisat de Lacadena, octroyé par la reine régente María Cristina à la fin du XIX° siècle (1890). Les Lacadena, ayant des racines à Jaca et Borau, ont quitté Jaca pour Berdún au XVII° siècle et comptent des propriétés en long et en large du Vieil Aragon: Jaca, Martes, Asso Veral, Santa Cilia, Berdún... etc. Trois petits palais ou maisons nobles sont particulièrement remarquables parmi elles.

Santa Cilia
Tout contre l’église paroissiale de Santa Cilia est conservé l’ancien palais des moines de San Juan de la Peña, un ensemble de divers bâtiments d’origine médiévale qui fut le siège du prieuré de Santa Cilia et occasionnellement le siège du monastère lui-même après sa destruction lors de la Guerre d’Indépendance, en plus d’être la résidence d’été des moines. La grande maison principale est couronnée par une monumentale cheminée tronconique, sur la façade principale s’ouvre une grande arche et une fenêtre gothique géminée, en plus des armes du monastère lui-même. Après la Désamortisation de Mendizábal, ce palais fut acheté par le Marquis de Lacadena, dont les descendants sont encore propriétaires.

Berdún
Le magnifique manoir que nous trouvons sur la place principale de Berdún est daté de 1736. Là est né en 1845 celui qui plus tard allait être le second Marquis de Lacadena, qui fit construire le palais de Jaca situé sur la place à laquelle le titre nobiliaire donne son nom (Plaza Marqués de Lacadena). Le magnifique petit palais de Berdún, avec des colonnes dans les angles et un grand écu avec les armes des Lacadena sur le linteau de la façade principale, est un exemple rare de l’architecture seigneuriale du XVIII° siècle dans la Jacetania.

Jaca
Située en plein cœur de la ville, la maison du marquis de Lacadena, au numéro 2 de la place qui rappelle cet illustre titre nobiliaire aragonais, confère une touche pittoresque à ce calme recoin du quartier historique de Jaca, en compagnie de l’ancienne tour de la Prison.

Ce manoir fut rénové au début du XX° siècle et, témoignant de cette transformation, sa façade principale constitue un curieux mélange de tradition et de rénovation; étant donné que sur une construction propre à l’architecture locale est appliquée une décoration moderniste, en suivant les tendances du courant floral, bien qu’ici dans une version plus modeste que celle qui avait triomphé en Catalogne. Une décoration florale travaillée par modelage qui est abritée sous le auvent de cette maison de Jaca, en animant le front des corbeaux qui le supportent, et sur les impostes qui parcourent la façade, en se concentrant sur les encadrements des ouvertures et les encorbellements sous les surplombs des balcons et des miradors, avec des pétales ouverts et charnus.

Par son état de conservation et par sa décoration, témoin de son temps et fidèle reflet de l’arrivée des nouveaux langages du modernisme et de l’esprit de rénovation qui s’est produit dans les premières décennies du XX° siècle, cette splendide maison doit être considérée comme un des bâtiments les plus intéressants qui sont conservés à Jaca, non seulement pour le travail délicat de sa façade, mais aussi parce qu’elle garde toujours sa structure d’origine et une grande partie de la décoration intérieure.

María Pilar Poblador Muga. Historienne.